L’entreprise spécialiste de télémédecine En faillite ! // N° 149
La société parisienne H4D, pionnière des cabines de téléconsultation, a été placée en liquidation judiciaire le 26 septembre 2024. L’arrêt d’exploitation de cette entreprise laisse sans solution les collectivités qui s’étaient procurées ces équipements, désormais inutilisables. Elle interroge surtout sur la viabilité d’une activité, présentée comme une solution à la désertification médicale, mais qui malgré le pic de téléconsultations, lié au Covid en 2020, peine toujours à trouver son modèle économique.
La société H4D (Health for Development), fondée en 2008 avec ce concept révolutionnaire et qui avait bénéficié de plusieurs levées de fonds substantielles (6,7 millions d’euros en 2016, 15 millions en 2020), a mis la clé sous la porte. Placée en redressement judiciaire le 4 juillet dernier, l’entreprise spécialiste de télémédecine a été placée en liquidation judiciaire le 26 septembre. Au grand dam des nombreux conseils départementaux et communes qui étaient équipés de télécabines et ont appris avec stupeur qu’elles ne seraient plus utilisables, puisque c’est la société qui mettait en relation le patient à un médecin.
D’après le maire de Saint-Paul-de-Varax dans l’Ain, la télécabine installée dans la commune de 1600 habitants, « n’avait rencontré qu’un succès limité n’accueillant que 300 consultations en 18 mois, loin de l’objectif de 1000 consultations par an ». Le département de Seine-et-Marne n’a, quant à lui, enregistré que 469 téléconsultations sur les 9 premiers mois de 2024 pour les dix télécabines dans lesquelles il avait investi.
Présentées comme une solution à la désertification médicale, les cabines H4D représentaient un investissement à l’achat élevé – entre 68000 et 100000 euros l’unité selon les modèles – sans compter les frais d’exploitation (10000 euros par an et par cabine en Seine-et-Marne).
L’arrêt d’exploitation de la société H4D traduit pour le Vice-président de l’Ordre national des médecins, « la fragilité du modèle » : « Les cabines ont été présentées un peu trop facilement comme une solution à la désertification médicale, affirme-t-il. Or, une télécabine ne répond jamais autant qu’une offre présentielle de proximité ». Quant au Président de l’Union de syndicats de pharmaciens d’officine, il porte même un regard critique sur la situation. « La téléconsultation, telle qu’elle existe, est un business, … il faut qu’elle s’assainisse et qu’elle concerne un patient et son médecin. »
Faut-il souligner qu’en juillet dernier, la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) a appelé à des « assises de la téléconsultation » pour étudier la pertinence des prescriptions à distance et la place des plateformes de téléconsultation dans l’offre de soins. Ce rendez-vous est attendu par plusieurs acteurs qui réclament un plus grand encadrement de la téléconsultation, notamment de l’installation des bornes et cabines. Il en est de même du Conseil national de l’Ordre des médecins (Cnom) qui demande depuis plus de 2 ans un encadrement plus strict de l’implantation de ce type de cabines, et de la Haute Autorité de Santé (HAS) qui a formulé des recommandations sur les lieux et conditions d’environnement pour la réalisation d’une téléconsultation ou d’un télésoin.
Medscape du 8 octobre 2024.